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21 mai 2013 2 21 /05 /mai /2013 23:14

En avril 1954, Guy Helmet reçoit la Médaille d'Honneur de l'Education Physique. Dirigeant du Salon Vélo dès 1923, puis du Vélo Club Salonais, il fut des années 30 à la fin des années 50 un remarquable "suiveur" de courses cyclistes pour "La Gazette Sportive". J'ai toujours aimé sa plume et surtout ses portraits qui m'ont aidé avec ceux d'Edouard Chauchard de Marseille-Matin; d'Etienne Vivaldi et de quelques autres à aimer encore plus le cyclisme et aller au delà des simples palmarès. Hommage lui soit rendu ici à travers cette chronique sur le plus garnd champion Marseillais des années trente.

 

 

AIMAR Louis

 

né le 5 janvier 1911 à Saluzzo

 

Du Grand Prix de Septèmes

aux "Nations"

 

La Belle Carrière

de

Louis Aimar

 

 

Vainqueur pour la deuxième fois du Grand Prix des Nations, un mois après avoir conquis le titre de champion de France de poursuite, Louis Aimar paraît arrivé, malgré les espoirs qu'il peut légitimement nourrir encore à l'apogée de sa carrière cycliste.
A cette occasion, il m'a paru intéressant d'écrire pour les lecteurs de La Gazette Sportive l'histoire de celui dont le nom s'inscrira à la suite de Jean Bouin et Gustave Ganay, parmi les gloires du sport marseillais. Les jeunes pourront y apprendre quels merveilleux exploits amenèrent le Grand Louis au succès qui, en 1938, devait changer sa destiné tandis que les anciens y trouveront l'attachant rappel d'un passé que les événements nous font paraître si lointain.

 

Débuts prometteurs

 

 

Né le 5 janvier 1911 à Saluzzo, dans le Piémont italien, au hasard des pérégrinations d'un père qui fit son petit tour du monde avant de se fixer définitivement à Saint Marcel avec sa famille. Louis Aimar, venu tout jeune à Marseille, avait 19 ans lorsque, en 1930, il fit ses débuts en compétition sous la casaque rouge et blanche du lion du vieux Cyclo-Club, cher au regretté M. Bertrand, qu'il devait quitter l'année d'après pour rentrer à l'U.S.T.M.
Ayant passé l'âge du Dunlop, Aimar, qui était déjà un solide gaillard moins étoffé qu'aujourd'hui mais à l'abattage puissant, devait marquer ses débuts officiels par un coup d'éclat en enlevant le Grand Prix de Septèmes devant l'unanimité des coureurs marseillais et régionaux de 4° catégories et débutants.
Quelques temps après, il confirmait son succès initial en battant les 3° catégories dans le Grand Prix de Salon.
Sa victoire dans cette épreuve vaut d'être contée car elle fut acquise in-extrémis sur des hommes plus rapides que lui, grâce aux qualités de rouleur qui ont fait aujourd'hui sa fortune et sa gloire, mais qui commençaient alors à se manifester.

 

Le Grand Prix de Salon

 

 

D'un peloton encore compact à Sain Rémy, Louche s'était échappé dans les Alpilles avec Oreste Bernardoni. Ce dernier étant accidenté dans la descente, Louche demeuré seul était rejoint à Mouriès par Carréga, Aimar et Delisle, puis par le Salonais Rey. Parmi ces cinq hommes, que ne pourront départager les derniers kilomètres de course, Louche faisait généralement figure de favori, l'arrivée se jugeant sur la piste en terre battue du vélodrome Marius Villette qu'il connaissait très bien pour y avoir déjà remporté maints succès. Mais aux abords du stade, Yvan, qui menait, hésita un instant sur l'itinéraire à emprunter tandis qu'Aimar, plus opportuniste, s'élançait résolument à travers une grande place au grand émoi des joueurs de boules. Le temps qu'ils soient revenus de leur surprise et le jeune crack du Cyclo-Club avait pris à ses adversaires une cinquantaine de mètres qu'ils n'allaient jamais pouvoir combler.
A un contre quatre, Aimar venait de remporter son premier match poursuite. C'est un fait dont lui-même ne se souvient plus ans doute et pour cela qu'il m'a plu de rappeler.

 

Résultats probants

 

 

Entre temps, en indiquant davantage ses possibilités que ses deux premières victoires au demeurant assez modestes, Aimar avait réalisé quelques exploits parmi ses aînés dont nous retiendrons ses places de second au Grand Prix Phénix, 12° au classement général du Critérium du midi, et surtout celle de 5° dans le long et pénible Marseille-Lyon, ce qui pouvait être considéré comme une performance remarquable pour un jeune débutant si bien doué soit-il.
Comme on le verra par la suite, le bon colosse de Saint marcel devait d'ailleurs toujours bien se comporter dans ce fameux Marseille-Lyon, s'adaptant si parfaitement à ses moyens qu'il eut mérité d'un jour le gagner.

 

Première catégorie

 

 

Ayant pris rang parmi nos meilleurs espoirs, Aimar ne décevra pas ses partisans, car dès sa deuxième année de course, exploit rare que seuls les grands champions égalèrent, il accède à l'échelon le plus élevé dans le hiérarchie des coureurs cyclistes.
Première catégorie à 20 ans, après avoir gagné le Grand Prix de Saint Henri, Marseille-Toulon et retour et le Grand Prix de Bandol, Louis se montrera digne de ses galons en gagnant encore au cours de la saison 1931 le Grand Prix de Mondragon et la quatrième étape du Circuit de Bône qu'il termine quatrième au classement général.
Au rang de ses performances les plus marquantes cette année-là, nous retiendrons encore ses places de 2° du Phénix et du Grand Prix de Marseille-Matin, 3° du Walsdorff à cannes, du Grand Prix de l'Avenir à Nice, et du Grand Prix de Langogne; 4° de Toulon-Aubagne et retour et 7° de Marseille-Lyon.

 

Toujours plus haut

 

 

Comme s'il voulait monter toujours plus haut et dépasser nos espérances, Aimar, s'affirmant chaque année davantage, remporte huit nouveaux succès en 1932.
D'abord dans le Grand Prix de Manosque, puis dans le classique "Walsdorff" - une des plus belles épreuves azuréennes -, le Grand Prix de Riez, Toulon-Nice, et les Grands Prix de Sainte Marthe, Alès, Saint Emilion et Roquevaire.
Nous le trouvons encore au cours de cette saison 13° de Paris-Caen - sa première sortie parisienne, - 9° du Tour de Vaucluse, 3° de Marseille-Lyon et 4° de Nice-Annot-Nice.

 

Trois beaux succès

 

 

S'il possédait toutes les qualités, maintes fois affirmées sur les parcours les plus difficiles, d'un grand routier digne de la succession du prestigieux Curtel, Aimar n'avait malheureusement pas le rush final du grand "Zé". Toutes ses victoires ou presque, sont acquises détaché. C'est de cette manière indiscutable qu'il enlèvera Nice-Annot-Nice, le Critérium du Var et le Tour du Gard, les trois seules victoires que nous trouvons à son palmarès de la saison 1933, que nous compléterons en ajoutant ses places de 2° au Grand Prix de Saint Rémy, 9° du Critérium du midi et 4° de Marseille-Lyon, sans oublier son triple succès en omnium, individuelle et américaine, au vélodrome des Taillades à La Grand Combe où il fit des débuts de pistard ma foi fort remarqués.

 

Huit victoires en 1934

 

 

Vainqueur aux premiers jours de l'année 1934 du Critérium International de la Ville de Nice, Aimar ajoutera sept autres succès au bilan de cette saison. Le plus beau est sans conteste celui qu'il remporte dans le Circuit du Mont Blanc; mais on ne saurait mésestimer ceux qu'il s'attribue dans ces "modestes" épreuves que sont le Grand Prix d'Apt, le "Phénix", le Critérium du Var, le Grand Prix de Pernes, le Grand Prix du Petit Niçois et la 2° étape du Circuit des Villes d'Eaux d'Auvergne. On ne saurait mésestimer non plus sa place de 3° au classement général du Tour d'Algérie en deux étapes, non plus son succès dans une américaine de 8 heures au vélodrome des Taillades dont le profil rugueux semble particulièrement lui convenir.
1935. Ayant épuisé tous les sursis légaux Aimar est parti à 24 ans accomplir son année de service militaire dans un régiment d'Artillerie à Nîmes. Des chefs sportifs, lui ayant permis de s'entraîner et de continuer à courir, les "godillots" et la gamelle ne seront pour lui un handicap. Et c'est ainsi que quatre victoires : dans le Championnat Militaire, le Souvenir Laffont, le Grand Prix des Italiens, de Nice, et la 3° étape du Tour d'Algérie viennent cette année-là enrichir son palmarès.
Des autres performances de l'artilleur Aimar il faut surtout mettre en exergue sa place de second dans le Circuit du Mont Blanc qui comprenait la montée des Arravis et qu'il gagna l'année précédente, et celle de deuxième également à l'issue des onze étapes du Tour d'Algérie.

 

Déclin ?

 

 

Libéré de ses obligations militaires Aimar enlève, au début de la saison 1936, le Grand Prix Charrier, devant ses camarades de l'U.S.T.M., puis, beaucoup plus tard, le Grand Prix de Bandol qu'il gagne avec 6 minutes d'avance sur Bettini après une échappée qui ne dura pas moins de 115 kms avec Nardy, d'abord, seul ensuite.
Mais à côté de ce joli succès Aimar ne réussit que des performances quelconques. Et ce ne sont pas ses modestes victoires à Valensole, à Courthézon et Istres qui feront changer d'avis les éternels détracteurs qui prétendent que le wattman a passé son heure et qu'il est en déclin.

 

Sa plus belle saison

 

 

Mais alors que l'on peut craindre non pas qu'il soit "fini" mais qu'il ait atteint son plafond, Louis se retrouve plus fort que jamais dès le début de la saison 1937, incontestablement la plus belle de sa carrière de routier.
Ayant négligé les classiques épreuves azuréennes de l'avant-saison, il fait sa rentrée dans le Critérium de Printemps, à Digne, qu'il gagne avec 2'30" d'avance. Quelques jours après c'est son étonnante victoire du Grand Prix de Grans où il réalise l'exploit de battre au sprint le Grassois Puppo demeuré seul avec lui.
Vainqueur ensuite de Marseille-Alès et retour en deux étapes, Aimar poursuit le cours de ses succès en enlevant encore, toujours au cours de cette saison 1937 : les Grands Prix d'Alès, de Valensole, de sainte Cécile, d'Amplepuis - où il bat au sprint Ducazeau, Goujon et Pipoz -, des Paluds de Noves, du Vigan, de Langogne, de Brioude et de Charlieu. Il triomphe aussi dans le Circuit du Forez où à l'issue des 240 kms d'une course très dure il règle à l'arrivée ses camarades Troggi Nello et Bernardoni; tous trois précédents de 12 minutes leur plus proche adversaire, le Lyonnais Bonnefond. Puis il enlève le classique Grand Prix d'Espéraza devant toutes les vedettes du cyclisme international, depuis Antonin Magne jusqu'à Marcel Kint, et enfin, à sa manière, avec 2 minutes s'avance sur cet autre rouleur qu'était Ongaro, le long et pénible Marseille-Nice qui manquait à son palmarès.
Si l'on considère qu'à ses quinze victoires viennent s'ajouter neuf places de second et quatre de troisième dans des épreuves telles que Lyon-vals ou Bourg-Genève-Bourg, on convient qu'Aimar a raison quand il dit que le grand regret de sa vie sera de ne pas avoir été sélectionné pour le Grand Prix des Nations cette année-là où il jouait littéralement avec ses adversaires quels qu'ils soient.
C'est au cours de cette saison qu'il s'attribua le 2° Challenge de "La Gazette Sportive", qui récompensait chaque année le meilleur coureur régional.

 

Un succès significatif

 

 

1938. C'est la grande année Aimar qui commence.
Une défaite due au sprint de Troggi Nello dans le Grand Prix Charrier, pour normale qu'elle soit, n'est pourtant pas pour nous faire présager de quelle façon, quelques mois plus tard, louis va couronner sa neuvième année de course. Plus significative sera sa première victoire de la, saison dans le long et pénible Toulon-Aubagne et retour qu'il gagne avec 6 minutes d'avance sur Bettini, précédant lui-même Giuppone, Molinar, Aureille, Ducazeau, Galateau frères, Bernardoni, Van Schendel, etc... Rien que des gars dont le seul nom constitue une référence.
Le plus remarquable de ce nouveau succès d'Aimar est qu'il fut acquis au terme d'une course de 200 kms comprenant entre autres difficultés le Brulat, l'Espigoulier, Saint Savournin, La Bédoule et la dire montée de Cassis où il décramponna Aureille et Bettini, demeurés jusque-là avec lui, pour couvrir seul les cinquante derniers kilomètres le séparant du vélodrome de Pont de Bois.

 

Spécialiste des courses par étapes

 

 

Si Louis, au cours de timides essais, a paru jusqu'à présent avoir du mal à s'adapter aux grandes "classiques" parisiennes, les courses par étapes au contraire, semblent lui convenir particulièrement grâce à sa régularité. On sait ses bonnes performances réussies au Tour d'Algérie les années précédentes... de cette année 1938 au Tour du Maroc disputé en douze étapes sur des routes parfois épouvantables, il se place deuxième au classement général à quelques minutes du vainqueur, l'Espagnol Canardo, après avoir été le grand animateur de l'épreuve.
Le Tour du Sud Est renaissant, le voit également réaliser une bonne performance. Vainqueur de la sixième étape et second au classement général à 39 secondes de son camarade Bernardoni, il doit sa défaite uniquement au jeu inique des bonifications qui avantagea le rapide Saint Rémois.
Au Circuit Pyrénéen, enfin, au parcours terriblement dur, il termine en 5ème position après avoir enlevé l'étape la plus dure, confirmant des qualités de grimpeur remarquables chez un homme de son poids et précieuses pour un gaillard de sa trempe.
Ayant ainsi beaucoup sacrifié aux courses par étapes Aimar n'aura pas eu le temps matériel de se composer en 1938 un palmarès aussi brillant que l'année précédente où il est bon de rappeler qu'il ne remporta pas moins de seize victoires. Pourtant, à ceux déjà cités, il convient d'ajouter des succès dans le Grand Prix de Mende, le Grand Prix de Saint Andiol et le Grand Prix de Saint Rémy.

 

Et rouleur plus que jamais

 

 

De ces trois derniers succès le plus beau est, sans conteste, celui acquis à Saint Rémy. Disputée sur 130 kms d'un circuit tracé sur les boulevards circulaires Saint rémois, cette épreuve groupait au départ une soixantaine de coureurs parmi lesquels Cassin, Bertocco, Galateau, Troggi Nello, Bettini, Rabasse, Pugliési, etc..., tous hommes s'adamptant mieux qu'Aimar aux courses en "tourniquet". Mais sachant ses chances réduites s'il attendait le sprint, notre Marseillais jugea bon de s'en aller seul dès le quinzième tour, sans souci de la centaine de "bornes" restant à parcourir, pour gagner avec deux minutes d'avance sur Bertocco.
Placées, après une éclipse assez marquée, dans la période allant du 31 juillet à la fin août 1938, les victoires de Mende, Saint Andiol et Saint Rémy témoignaient chez Aimar d'un retour de forme qui se manifestait encore par ses places de second au Grand Prix d'Issoire, au Circuit des Cévennes et dans Bourg-Genève-Bourg.
Mais mieux que toutes les autres, c'est je crois sa place de troisième dans Marseille-Lyon, considérée à juste titre, comme la plus grande épreuve internationale de la fin de saison, qui allait décider de son avenir en attirant enfin sur lui l'attention des critiques parisiens et celle des sélectionneurs du Grand Prix des Nations, compétition bien dans ses moyens, mais au départ de laquelle on n'avait jamais songé à l'inviter malgré les demandes réitérées de son dévoué mentor, M. Blanc.

Guy Helmet

La Gazette Sportive 1942

 
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